Le flic et le bagarreur [Ciàran Moore/Tobias O'Connell]

Deux hommes. Un duel. Le premier est bien élégant dans son uniforme. De ce qu’en témoigne sa perruque… Ouais, aucun doute, il est vieux. Il porte des lunettes. Pardon, une paire de lunettes. Bien élevé, il fait preuve d’une belle éducation. Il est élégant ce gars. Et il y a son opposant. Moi. Un jeune ocelot caché sous peau humaine à la fougue incessante qui vient de mettre une droite à cet enfoiré. Je porte une chemise à carreau et un jean. La panoplie du parfait bûcheron, la casquette en plus évidemment. Ma plus longue histoire d’amour c’est avec elles. Je ne m’en sépare jamais. Si, sous la douche quand j’y pense. Tout ce blabla pour dire que j’ai l’air moins chic que lui. J’ai le style country. Lui c’est plutôt blingbling. Pour ceux qui débarquent, c’est évident. C’est moi le problème. Je suis vu comme la racaille. Pourtant, qui n’a jamais entendu cet adage : l’habit ne fait pas le moine ? D’ailleurs certains d’entre eux ont violé des enfants. Cela donne plus de sens au fait de les appeler « mon père », à croire que ce sont eux qui ont peuplé la Terre. Donc ce charlatan-là, je ne le baffe pas sans raison. Pour comprendre d’où vient ce zèle de tendresse que je lui porte, il faut revenir quelques minutes en arrière.

Moi je suis posé avec mes potes. Je suis tranquille. Oklm. On passe un bon moment, on discute. Ma pote a besoin d’une pause pour aller pisser. Quand elle revient, je vois y a un truc. Je dis rien. On continue la soirée. Ma pote, elle a de nouveau besoin d’aller aux toilettes. Oui, c’est une fille donc c’est une fois par heure. Mais cette fois, elle me demande de l’accompagner. Je suis surpris mais j’accepte, je me dis, peut-être elle a un truc à me dire. Je vais avec elle. « Qu’est-ce qui se passe ma belle ? » Elle tourne la tête de l’autre côté. Elle évite mon regard. « J’aime pas attendre seule, je m’ennuie. » Je me marre. Je suis juste là pour la divertir. Pourtant, je la sens pas dans le mood. Elle se comporte bizarrement. Je la fixe avec attention et je remarque qu’elle jette furtivement des coups d’œil à un mec. Déjà là, je sens que ça monte. Elle ne m’a rien dit. Elle n’a pas besoin. « Ok, je vais me le faire. » - « Non Tobias ! Attends ! » Trop tard, je suis lancé. J’ignore tout de ce qu’il a dit ou de ce qu’il a fait. Mais si mon amie est mal à l’aise, c’est qu’il a mal agi. J’arrive dans son dos. Je l’interpelle poliment. « Hey ducon. » Il se retourne. Il me fixe de bas en haut avec un air supérieur. C’est immédiat : j’l’aime pas. Ma pote est juste derrière moi. « Présente-lui des excuses. » Dis-je d’un signe de tête en la révélant à lui. Mais l’homme refuse. Il ne comprend pas pourquoi il devrait faire ça. Ma pote met sa main sur mon épaule. « Tobias c’est bon, ça va. » Ça sonne faux. Elle dit ça pour me calmer mais ça me fait grimper encore plus. Non en fait c’est lui qui m’agace. « Écoute petit. On passe tous une bonne soirée. Elle te dit que ça va. Arrête de te donner en spectacle, t’es ridicule. » J’en ai rien à foutre d’être ridicule. Moi je m’assume. C’est pas son cas. « Présente-lui des excuses. » J’ai rarement été aussi diplomate. Ce n’est pas dans mon caractère de me répéter. Alors le gars lâche un soupir et lève les yeux au ciel. Ok. C'est donc là que je vais l'envoyer dans cinq… Quatre… Trois… Deux… Un. Bam. Uppercut.